Au sujet de la confusion entre thérapie primale et direction spirituelle (Lettres de la planète terre)
Chez Monsieur Pandore,
j'ai été très étonné en lisant votre dernière intervention parmi vos administrés. En effet, vous y faites précisément ce que vous me reprochiez dans une récente correspondance : apprendre le calcul intégral à des élèves de maternelle. Il me semble pourtant que j'ai demandé des choses moins difficiles que vous. Lorsque je suis intervenu sur votre forum, je me suis contenté de pointer quelques incohérences dans le discours de certaines personnes. A S*, j'ai indiqué qu'il mettait la charrue avant les boeufs, quant à V*, je lui ai montré preuves à l'appui qu'il ne lisait pas les messages auxquels il prétendait répondre. Que S* ait fait un primal et que V* se soit drapé dans sa dignité blessée a montré l'état de leurs défenses, c'était à mon avis un premier pas qui pouvait être suivi de bien d'autres. Dans le cas présent, vous procédez d'une manière infiniment plus difficile à appréhender, puisque vous conseillez à une personne qui se trouve manifestement en pleine souffrance primale d'analyser les choses et d'en déduire qu'une vue erronée est à l'origine de son problème, sans même lui indiquer comment s'y prendre (sinon de manière analytique, ce qui n'a japmais dénoué la moindre souffrance primale). A l'évidence vous confondez une souffrance passée avec une souffrance actuelle, et votre conseil montre une vaste ignorance du karma de cette personne. C'est comme si vous disiez à un homme en prison de se libérer en passant à travers le mur, alors que la solution consisterait à appeler son avocat et à lui fournir de nouveaux éléments lui permettant d'être innocenté. Dans le cas présent, vous assimilez la souffrance primale à un besoin d'aimer, voire à un désir de Dieu. C'est un raccourci pour le moins cavalier, car même si cette vue n'est pas fausse ultimement, elle n'est pas ce qui va dénouer le karma. L'expérience montre que la souffrance primale est cristallisée par le désir d'être aimé par le petit enfant ou même le bébé (un désir qui certes n'est pas reconnu dans votre système). Autrement dit, vous vous adressez à une grande pratiquante alors que vous avez, littéralement affaire à un bébé (heureusement doté d'un certain esprit rationnel). Vous m'avez dit comprendre les principes de la thérapie primale, mais cela ne semble pas être le cas. Sinon vous indiqueriez à cette femme la seule chose qui lui reste à faire, et vous lui expliqueriez à quoi s'attendre. Vous lui expliqueriez qu'elle va devoir plonger dans sa souffrance au niveau du ressenti, et retrouver les souvenirs qui ont, en premier lieu, généré cette souffrance. Un abandon probablement. Lui expliquer qu'il s'agit de retrouver une souffrance physique, et non une souffrance morale ou spirituelle. Lui indiquer comment le corps se comporte lorsque le souvenir remonte. Lui conseiller de lire Le cri primal. Et lui déconseiller de se lancer seule dans l'aventure.
Je sais quelque chose de tout cela, car l'an dernier, j'ai vu Sélénè dans le même état, lorsque Petit Jean lui a fait une infidélité. Elle se voyait déjà seule et abandonnée, s'imaginait déjà se jeter dans la Marne. Il eût été quelque peu déplacé de lui conseiller une investigation de la sorte de celle que vous conseillez. De fait, son problème a été temporairement réglé par mes attentions, il n'en reste pas moins que la base est toujours là, comme on pouvait s'en douter, et que seule une forme de thérapie primale pourra résoudre la question. Lorsque la peur de l'abandon est là, il n'y a aucun Dieu qui tienne, aucune investigation spirituelle qui puisse fonctionner, il est évident qu'il y a des événements à retrouver et à réintégrer dans la conscience, et que tant qu'ils ne seront pas retrouvés, c'est toujours la même pièce de théâtre qui va se rejouer.
Nous en venons donc au deuxième point de ma lettre. Vos conseils ne sont pas calculés pour aider la personne. Ils m'apparaissent même comme une forme subtile d'auto-érotisme, où vous vous délectez de vos propres explications. Il est vrai que pour celui qui les comprend, c'est une lecture assez sympathique. Mais pour celui qui ne les comprend pas (je les ai fait lire à Sélénè) il semble en résulter un certain mal de tête. Cela illustre tout ce que je pointais dans notre récente correspondance : une certaine ignorance volontaire de l'autre. Dans ce dialogue avec cette brave femme, vous vous révélez bien comme adorateur de l'Un, passant un temps considérable à rédiger un texte qui vous plaît à vous, sans demander le moindre renseignement qui pourrait vous permettre d'éclairer le cas dont vous prétendez traiter.
Bien à vous.