La vie est une longue publicité (lettres de la planète terre)
Mes chers amis,
Je ne sais pas si vous savez ce qu'est la publicité. C'est une façon de vanter les mérites d'un produit que l'on veut vendre. Peu importe que cela soit absurde, mensonger ou carrément hors de propos, l'objectif est de vendre, et non de présenter les qualités réelles du produit.
Ce soir, justement, en voyant la publicité de la Caisse d'Epargne (une banque), qui accompagne Monsieur Duduche dans ses études, et puis ensuite celle de la MAIF (une mutuelle, le terme restant à définir), j'ai brusquement réalisé que c'est la façon de fonctionner de ce monde dans son entier, à quelques exceptions près. Chacun voit tous les autres, ou se voit, comme ce banquier, qui suit son client avec amour, comme son propre enfant. Alors que c'est un requin dont le métier est de plumer les pigeons (une sorte d'oiseau un peu maudit). Mais l'image de l'ami attentionné, pour absurde qu'elle soit dans ce contexte, ne choque personne j'imagine, sinon cette publicité n'existerait pas. De même, l'image de la fraternité spirituelle ou de la sangha, ou de la famille, où tous se soutiennent les uns les autres, est considérée comme un fidèle reflet de la réalité. Alors qu'on peinerait à trouver quelqu'un qui penserait à autre chose qu'à lui-même. Bref, bien que la publicité mensongère soit interdite, elle est partout.
De fait, lorsque les gens d'ici sont dévoués entre eux, c'est rarement pour aider l'autre, et presque toujours pour se fuir soi-même. Le dimanche qu'on passera à aider son frère à déménager, c'est un dimanche de moins qu'on passera face à soi-même, ou à sa télévision. Les heures qu'on passera à cuisiner pour toute la famille sont autant d'heures pendant lesquelles on n'aura pas à méditer sur sa situation misérable. C'est le contraire de ce que vous connaissez, lorsque vous vous réunissez pour la joie d'écouter les autres et d'échanger avec eux. C'est pour cette raison que je suis assez peu serviable, car je préfère me tenir seul face à Dieu qu'entouré de personnes qui n'ont rien de plus pressé que de le fuir et de faire insulte à leur propre intelligence. De la sorte, je passe pour un asocial, alors que je veux certainement plus de bien à mon prochain que sa propre mère, qui ne l'a éduqué que dans le but de partager la misère commune, d'en faire un gibier de samsara.
Car il est une vérité dans ce monde : la souffrance est le Bien commun de l'humanité, et il est interdit d'en sortir. Si vous tentez quoi que ce soit dans ce sens, vous serez déshérité, sauf si vous êtes né dans une famille de Rinpoches ou de Saints. Les humains ne savent pas comment sortir de leur condition, ils possèdent cependant un flair infaillible pour dépister celui qui fait des efforts dans ce sens. C'est pour cette raison que Jésus a dit : " N'allez pas croire que je sois venu apporter la paix sur la terre; je ne suis pas venu apporter la paix, mais bien le glaive. Oui, je suis venu séparer l'homme de son père, la fille de sa mère, la belle-fille de sa belle-mère : on aura pour ennemis les gens de sa maison". Matthieu 10, 34-39.
Mais si chacun devait reconnaître que ses parents ont fait son malheur et qu'ils ne souhaitent pas le voir heureux, et que lui-même ne sait rien faire d'autre que le malheur de ses propres enfants, le choc d'une telle révélation serait sans doute insupportable.