Progresser dans la pratique
Hier soir nous avons vu S*, ce qui a mis en lumière un certain nombre de points nécessaires à développer pour qui espère progresser dans la pratique.
1) Apprendre à distinguer entre les faits et les croyances. Donc observer autour de soi, au lieu de s'imaginer qu'on sait déjà tout. Par exemple, S* pensent que certaines personnes ont un désir positif de faire le mal. Quand on lui demande si elle a observé ces gens de près, elle répond qu'elle ne fréquente pas de telles personnes. Donc on se demande bien comment elle pourrait connaître leurs intentions ou leur mode de fonctionnement. Je l'ai invitée à regarder des vidéos de Hitler où sa nature de channel apparaît clairement, et qui mettent en évidence le fait qu'il est complètement tamasique en dehors des moments où il ne parle pas à des gens. De même, beaucoup de gens pensent qu'ils sont heureux. C'est tout simplement qu'ils n'ont pas conscience des moments (largement majoritaires) où ils sont dans le tamas. Par définition, on n'a pas conscience de ce qui se passe dans le tamas, il n'y a que les moments dynamiques qui se gravent dans la mémoire, ce qui explique que personne ne sache à quel point il est malheureux. Autre exemple, je connais quelqu'un qui est absolument convaincu qu'il était très heureux avec moi il y a 2 ans, alors que ça n'est pas du tout ce que j'ai observé. J'ai observé qu'il était majoritairement inerte et mécontent, ayant beaucoup plus de conscience immédiate que lui, et que c'était entrecoupé de moments où il était content. Mais comme il n'en a aucun souvenir des phases inertes, il a construit depuis une sorte de mythe du paradis perdu dont il n'est pas près de sortir puisque c'est fondé sur une reconstruction complète de la réalité.
Bref, non seulement il nous faut distinguer les faits externes, l'état réel des lieux et des gens, mais aussi les faits internes, le fait que l'état ordinaire consiste à être tout le temps dans une inertie ou une agitation destinés à cacher le mal-être existentiel (le bouddhisme parle de souffrance de base, celle qui est dûe au fait qu'on n'a que des vents karmiques et aucun vent de sagesse, les vents de sagesse étant ceux qui circulent dans le canal central).
L'observation des faits est également ce qui nous permet de développer des cognitions valides sur certains objets du dharma, comme le karma, l'ego, la liberté, ou l'interdépendance, et de comprendre le mode d'être des phénomènes. Une observation plus fine permet ensuite d'appréhender les objets plus subtils.
2) Apprendre à distinguer entre les cognitions valides et les croyances. Par exemple, S* nous disait qu'elle n'était pas encore trop sûre de vouloir réaliser le Soi, et qu'elle n'avait pas trop envie d'aimer tout le monde. Il est évident qu'elle était en train de parler non du Soi mais de son idée du Soi et de ses croyances au sujet de ce qu'était l'amour divin, et que ces croyances et idées étaient tout simplement des obstacles en plus d'être fausses. Il arrive un moment où on comprend que seules les pensées et croyances ont le pouvoir de nous mettre mal à l'aise, car les cognitions valides nous rendent toujours heureux. On oublie donc tout le reste en se disant que ça ne sert de toutes façons à rien sauf à nous faire douter.
3) Avoir une pratique qui permet d'expérimenter la félicité d'une façon reproductible et relativement courante, ce qui permet aussi de développer des reconnaisseurs. Par exemple, S* n'avait apparemment pas d'expérience réelle et fiable de l'amour divin, d'où elle déduisait qu'elle n'avait pas envie d'aimer tout le monde. Dit autrement, sa croyance montrait qu'elle n'en avait aucune expérience fiable, ce qui est un des plus gros obstacles à la progression. En effet, même si on coupe les fausses croyances et les idées sans queue ni tête venues du mental, si elles ne sont pas remplacées dans la vérité de l'amour divin, on tombe simplement dans le vide. Certains pensent qu'il suffit de faire taire le mental pour être heureux, c'est tout à fait faux. Il est nécessaire de produire des expériences de félicité positives, sans quoi la pensée est simplement remplacée par l'inertie. En effet, chez une personne ordinaire les noeuds du karma empêchent les vents d'entrer dans le canal central, ils se "posent" donc simplement n'importe où à l'extérieur quand on cesse de les agiter. Par ailleurs il ne s'agit pas de produire une fois la félicité, mais des milliers de fois, afin de graver la bonne attitude dans la mémoire physique/subtile, ce qui prend un temps fou. Il n'y a que cette mémoire qui permettra au corps d'adopter une forme correcte en dehors des sessions et de conserver la félicité en permanence. En effet, nos canaux subtils sont dans une attitude de fermeture depuis de très nombreuses vies, et même si ce n'était que depuis notre petite enfance, cela fait des dizaines de milliers d'heures de mauvaises habitudes.