Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
L'entraînement de l'esprit
A lire...
23 décembre 2017

Le Père Cleopas

Je viens de relire Le Père Cléopas, le genre de livre qu'on n'a jamais assez lu. Comme à la fin de chaque livre, je me suis demandé ce que j'avais appris. Et cette fois, j'ai été plongé dans une perplexité sans fond qui m'a empêché de dormir pendant trois heures la nuit dernière.

A n'en pas douter, je suis un mauvais chrétien. A supposer que je sois chrétien. Mais qui l'est aujourd'hui ? Je veux dire, qui peut l'être ? En effet, ce qui m'est apparu dans ce livre, ce sont les bases de l'Eglise telles qu'elles ont été posées par le passé, bases nécessaires à son fonctionnement. Or il me semble que deux de ses piliers ont disparu, je ne sais combien il y en a, mais ces deux-là sont importants. 

Le premier, c'est bien sûr l'intrication du monde surnaturel et du monde physique, qui n'apparaît déjà plus si clairement au XXè siècle, mais qui est vraiment éclatante au XIXè siècle, dans des biographies qui se veulent plutôt bien documentées. Je veux dire que nous ne parlons pas là de Légendes dorées, mais d'efforts louables de personnes ayant recueilli tous les témoignages possibles. Et il y apparaît que le monde surnaturel y intervenait aussi souvent et facilement que les chats de mes voisins dans mon jardin, c'est-à-dire tout le temps. Quelqu'un se retrouve-t-il en prison ? Il en sort par les murs ou je ne sais comment (quoique, au XXè siècle c'est encore très courant). Un moine est-il malade ? Pas besoin de médecin, la communauté prie pour lui et il est remis dans la journée. Pas besoin de manger ni de boire ni de dormir, d'ailleurs. Enfin, j'exagère à peine, Même les enfants peuvent vivre d'une vie surnaturelle et suivre la règle des moines. Tout cela grâce à quoi ? Et j'en arrive au deuxième pilier : à la prière des Frères.

Dans une véritable communauté chrétienne, on ne prie pas pour soi, on prie pour les autres. Aujourd'hui, si un saint nous disait "Priez pour moi", nous nous dirions "Qu'a-t-il besoin qu'on prie pour lui puisqu'il est saint ?". Mais ça ne marche pas comme ça. Ce qui est au fondement du christianisme, c'est la relation hypostatique. J'aime l'autre en tant que Personne, parce qu'il est le reflet de la Personne de Jésus. Prier pour moi, cela me prive de cette relation, et puis d'ailleurs si je ne sais plus aimer les autres en tant que Personnes, il y a de fortes chances que je sois incapable d'établir une relation correcte avec Jésus, qui est en quelque sorte la Personne absolue. Je vais me mettre à le prier pour ses Attributs, c'est-à-dire pour le bien qu'il peut m'apporter, au final j'en fais un objet. Il en va de même avec mon prochain. L'aimer pour ses qualités, c'est l'aimer pour ce qu'il m'apporte. L'aimer purement, c'est au fond l'aimer en tant que Personne, et de là prier pour lui. Ce qui dans le temps s'avérait d'une redoutable efficacité. Un moine était-il en difficulté ? Les autres priaient pour lui et tout s'arrangeait. Il y avait cependant des limites à cette aide. Le Père Cleopas a refusé de prier pour un moine dont la communauté mangeait et dormait à satiété. (Du coup, il m'est impossible de croire que les saints vont prier pour nous qui vivons dans le confort. Ils vont prier pour les malades, les affamés, les condamnés... mais pas pour nous. A peine peut-être pour nous convertir, histoire que nous ne fassions pas trop de mal).  

Mais prier pour autrui, c'est aussi prendre son péché sur nous. Attendu que dans une Eglise correctement constituée, tout le monde fait la même chose, cela ne peut fonctionner qu'ainsi. Vous connaissez peut-être cette histoire chinoise :"Une nuit, Confucius rêva qu’on l’emmenait voir les damnés qui croupissaient en enfer. Quelle ne fut pas sa surprise de s’apercevoir que l’enfer était une salle de banquet énorme et les suppliciés étaient assis autour d’une table qui grinçait sous le poids d’une nourriture aussi abondante que délicieuse. Ils avaient le droit de manger tout ce qu’ils voulaient mais ils devaient impérativement utiliser des baguettes. Or, leur baguettes mesuraient 1.50 mètre de long. Les damnés mourraient tous de faim et ils savaient qu’ils passeraient l’éternité à contempler cette nourriture sans pouvoir la manger car ils n’arriveraient jamais à résoudre le problème des baguette. Tel était leur calvaire, telle était leur pénitence. Juste après on emmena Confucius au paradis. Il fut encore plus surpris de découvrir que ce paradis était la réplique exacte de la pièce précédente à ceci près que les convives sont rassasiés et nagent dans le bonheur. Pourtant, eux aussi doivent respecter la même règle: manger avec des baguettes de 1.50 mètre de long. Mais, ce qui les différenciaient des damnés c’est qu’ils se nourrissaient les uns les autres".  Alors tout le monde souffre, mais tous deviennent saints. Alors que lorsque l'on prie pour soi, personne ne souffre, et personne ne devient saint.

Celui qui est censé donner l'exemple, c'est le prêtre, plus exactement le confesseur (starets). Il suffit encore une fois de lire ce qui est écrit pour se rendre compte que les péchés sont remis pour la simple raison que le starets les prend sur lui. Rien à voir avec un tour de magie. Comme le dit Dumitru Staniloae dans Spiritualité et communion dans la liturgie orthodoxe, le Christ a pris un corps parce que le péché est commis au niveau du corps, et que ce n'est que là qu'on peut l'enlever. Les anges et les saints morts, qui ont des corps de lumière, ne peuvent rien pour nous à ce niveau. Au mieux, ils peuvent nous communiquer leur énergie spirituelle. Mais la rémission des péchés, c'est autre chose. Jacques Fesch ne s'est pas réveillé chrétien par miracle. C'est Marthe Robin qui a prié pour lui. Marthe Robin qui n'était pas clouée au lit sous le poids de ses propres péchés, mais pour ceux des autres. Le starets, par sa vie en Dieu, pourrait jouir d'une santé resplendissante. Si le Père Arsène pouvait se régénérer d'une journée de goulag par une nuit passée à prier et non à dormir, on comprend les vertus que cela peut avoir. Mais non, les starets sont très malades, le Père Prophyre souffrait de dix maladies mortelles... on se demande bien où il avait pu les attraper, le malheureux. Je suis certain que de l'avis de la médecine, tous ces saints ne pourraient même pas être en vie. Certains saints catholiques ont détaillé comment le péché des autres leur tombait dessus, de quelle façons c'était ressenti, et le temps plus ou moins long qu'il leur fallait pour s'en défaire. Sainte Thérèse d'Avila mentionne le cas d'un prêtre qu'elle a tiré d'un péché mortel (on devine lequel). De ces histoires, on en trouve des milliers, en réalité.

Sauf qu'aujourd'hui, quand vous arrivez dans une communauté monastique, il ne se passe rien de tel. J'ai eu un ami qui voulait devenir Chartreux, il a passé six mois chez eux. Le régime alimentaire (il y manquait sans doute quelques vitamines, mais rien à voir avec le régime du Père Cleopas :"Si tu peux prendre trois râclées par jour et te contenter d'un repas tous les trois jours, tu peux venir au monastère"), le climat (il avait pourtant droit à du chauffage) et les offices nocturnes ont eu raison de sa santé, alors qu'il n'était pas particulièrement malade, ni faible. Dans ses lettres, il a mentionné le cas de Frères en assez mauvais état. Alors on a beau me dire que ne rien manger et dormir peu "c'est très facile, je connais des tas de gens qui le font", je connais plutôt des gens qui ne peuvent pas se passer de leurs 8h de sommeil et de leurs petits légumes. Moi le premier. Et ceux qui tentent de se faire moines, dont on a déterminé qu'ils avaient la vocation, ils ne peuvent pas. Les Chartreux, c'est l'élite du monachisme catholique, le sommet. Et ils ne sont plus capables de prier les uns pour les autres. Je ne parle même pas de les guérir d'un cancer. Je parle de permettre à un nouveau Frère de s'intégrer, dans des conditions qui n'ont franchement rien à voir avec les ascèses des temps anciens. Ces gens sont censés prier pour le monde mais ils ne peuvent même pas prier pour leurs frères. Je ne critique pas les Chartreux, je décris la situation, car il est bien évident que dans les autres communautés, c'est encore pire. Quand on regarde les reportages, on voit que ce qui les préoccupe le plus, c'est de gérer leur domaine, vendre des livres, des confitures, du chocolat... Il y en a même qui élèvent des poulets pour les vendre. 

Alor je repose ma question : comment être chrétien, c'est-à-dire prier pour les autres ? Pour le Père Dautais, on peut être chrétien sans prier pour les autres, puisque "on peut être bon chrétien sans souffrir". Comment se confesser à un tel prêtre ? Il est en train de me dire qu'il n'est pas question pour lui de prendre les péchés de ses paroissiens, et je le comprends, d'ailleurs, vu le monde dans lequel nous vivons. Mais je sais qu'avec lui, mes péchés ne me seront pas remis, parce qu'il n'y aura personne pour les prendre. Alors, à quoi bon aller faire le guignol ? 

Alors voilà, je voudrais être chrétien, mais je ne sais pas comment, parce que, entre les anges qui font défection d'un côté, et l'égoïsme universel, je n'ai pas la capacité de prier pour les autres. C'est toujours cette même équation : comment donner ce qu'on n'a pas reçu ?

Pour le reste, la messe le dimanche, les agapes, chanter ensemble, faire des prières que Dieu n'entend pas parce que nous ne savons pas prier, à quoi ça sert ? C'est l'habit du christianisme, pas l'esprit. Je voudrais être chrétien dans l'esprit, pas dans l'habit.  

Elder Cleopa - On Prayer

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité
L'entraînement de l'esprit
Derniers commentaires
Enseignements de Rudi

Fear
We have the capacity in our minds to create that which we are most afraid of; in the same way that we bury some ignorance like a grain of sand inside the shell of an oyster and build around it until we come up with the end product, which in this case is not a pearl.

God
It is finally this consciousness that allows a human being to feel God as the constant energy that is absorbed by all of the chakras, filling him with sweetness and joy. Not feeling happy is only the result of not being in tune with this force and not having the consciousness to contain it. For whatever reason we fail in holding onto energy, we must look to ourselves. We cannot blame anybody or anything. It is only our lack of capacity to hold that which is given.

Revelations

In all teachings, the temptations that appear during the revelation period are those things we identify with, that take away the energy or content from the experience. It is the courage to put the bottom on the void, so that the incoming energy is not lost during any experience, that is required. This enables a person to grow endlessly, by surrendering content as fast as it manifests itself.

Seekers
It is a remarkable event when somebody presents a situation that exposes their real need. It is rare when even half the truth is given. Usually a situation is distorted beyond recognition. It is as if somebody is saying to me that if I can dig out the real situation, maybe they will allow me to help them. When a situation occasionally is presented in all its nakedness, it is only because the person is defenseless at a particular moment. As soon as they have one stitch to put on their back, they again retreat into themselves, distorting what they said and what they think you said. The ability to hear and see is rare in this world. It only exists in somebody who truly wishes to grow. This has not, unfortunately, been the attitude of most seekers. So few succeed in reaching their goal that it is safe to assume that there are few who honestly pursue a spiritual life, and even then, very few teachers who cater to anything that brings the realism that allows for enlightenment.

Spirituality

Spirituality is not about being where you think you should be. It is not about being where you want to be. Spirituality is about being on the highest point of an ascending energy that keeps growing and growing.
As this energy grows, it completely destroys every level of truth as you live it. This does not mean the truth that has been destroyed was not real. It was real for the level on which you existed before. With students, I am not interested in how long they are with me; I am just interested in one thing: whether or not they are strong enough to break up the horizontal level and continue growing. For myself, I do not want to limit myself by what I was. I do not think, "I did all this work to get to here." That is baloney. That is making a drama of your life and trying to build an image for yourself. The point is to keep growing. It is to have the courage to keep growing, even if it pulls apart the structure of your life. Then it is freeing you. There is nothing wrong with pulling apart the structure. What is wrong is to build yourself into a coffin and then stay there and try to justify it. Either you are working to live on a higher level all the time and to have a rebirth all the time, or you are trying to find justification for staying the way you are.
The whole point of what we do is to destroy matter, which is this horizontal plane we sit on: the earth. It is to translate this physical and material matter into spiritual force. This is our work.

Surrender
You sit down. Inside you, what is going on? You want to be right. "I'm a nice guy, how could this person do this to do me? How could someone take advantage of me in the business world," or "How can somebody not love me? Don't they understand what I did?" Inside you, these muscles close up; they are protecting you. They are protecting your ego, protecting the image you have of yourself. You sit down to take your breath, and you find that something has robbed you of your heart. What robbed you of your heart ? The need to be right. These muscles do not want to open. They would rather you were safe and secure behind the wall than outside the wall.
Surrendering is opening all the muscles. This is the real test of your surrender in a situation. Can you breathe ? Does the throat open to receive the energy ? Are you free to receive this energy and open and see what your condition really is ? If you find out you are constricted in your heart, you have a pain in your back, or you can't get the air down, what does it mean? It means you are closed. What closed you? It does not matter what closed you, you do not have to find the rational reason, you just have to open. You sit and work, and you breathe. I do not have that problem anymore, but I used to sit and take that breath six hundred times in one day, sometimes, to begin to feel a little crevice start to open. If you are closed, you are dead. You can't be right if you are closed. Can a closed person know what he or she did or did not do ? So, if you find that you are closed, you have to drop the whole issue of whether the other person is or is not right.


Gratuit en ligne :

Snap8

Pas cher en Kindle :
Snap7 iow

Pas donnés sauf si vous avez de la chance :
EI bcc

Visiteurs
Depuis la création 55 711
Publicité