Lettre d'Alix-007 à un bouddhiste ayant décliné sa demande d'hébergement
Est-ce que si j'avais été Geshe G*(sans parler du Lopön !) tu m'aurais fait une telle réponse ? J'en doute quelque peu, parce que tu aurais certainement pensé que tu aurais pu en tirer quelque chose, et que tu ne devrais pas manquer de respect à un être "élevé" en lui refusant l'hospitalité. En tous cas, ta réaction montre ce que je savais déjà, à savoir que les pratiquants "bouddhistes" sont tout sauf des "frères" pour le reste de l'humanité et ne considèrent que leur bien-être. Une collègue de travail athée, qui a deux enfants en bas âge, dispose seulement de deux pièces, se couche elle aussi très tôt a accepté de me rendre ce service, somme toute pas extraordinaire, puisqu'il ne s'agissait que d'une fois unique. Quant à des chrétiens ou musulmans pratiquants, ils n'auraient même pas idée de refuser ainsi l'hospitalité, parce que cela serait pour eux une véritable honte.
Mais pour toi tu ne peux envisager l'existence autrement que comme la recherche du confort (fût-ce dans une grotte et à deux), dans un petit nid douillet, en sorte que 1) la charité n'est pas une option, cependant que 2) il est inconcevable de souhaiter à quelqu'un autre chose que le confort (même s'il ne s'agit que d'un voeu pieux en définitive ! Nous retrouvons là le léger inconvénient du stade de génération, qui fait méditer sur la compassion, tout en estimant qu'il n'est pas nécessaire de la mettre en pratique). Parce que ce qu'on veut pour soi, c'est ce qu'on va vouloir aussi pour les autres. C'est pour ça que tu espères que j'obtienne une solution "pérenne", malgré toutes tes méditations sur l'impermanence, qui auraient dû d'apprendre que pas grand chose n'est "pérenne" dans cette existence conditionnée. Déjà, je ne vois pas du tout dans l'ordre naturel qui pourrait accepter de me loger à long terme gratuitement ou avec une très maigre contrepartie, et dans l'ordre surnaturel le fait d'expérimenter l'incertitude donne une occasion (à ma mesure) de développer un tout petit peu de confiance en Dieu et de Foi dans les enseignements.
Sachant que j'ai déjà pu vivre comme ça pendant un an grâce à la générosité d'amis ou de connaissances, que j'ai visité ainsi déjà plusieurs foyers, que j'ai appris plein de choses en observant les autres, même si ça a été parfois (et même souvent) un peu aventureux... Il se trouve en plus que j'aime parfois prendre la parole là où ne l'attend pas et donc que je peux être mis dehors assez vite. La semaine dernière, mon train est arrivé à 2 heures du matin, j'ai fait deux heures de queue pour le taxi et je me suis levé à sept heures pour reprendre le métro. Cette semaine, il y a grève prévue le jour de mon retour. Mais c'est pas grave, parce qu'au moins les habitudes sont rompues et je souhaite que ça continue comme ça tant que cela est possible car j'aime bien ce travail avec les enfants.
Alors, qu'est ce que vous souhaitez avec D* ? Vivre en ermites et isolés du monde en espérant sortir de la ronde des existences en cette vie ? Mais tu as avoué toi-même que tu n'y songeais pas trop vus les efforts insensés que cela demande pour aboutir au but, et que tu voulais juste améliorer un peu ta situation. Alors ce manège risque de se prolonger pendant des éons et au final je ne suis pas certain que la joie et un épanouissement personnel en résultent. Alors que si l'on suit la voie chrétienne tracée par Jésus, il est possible de réaliser le corps ilusoire en une seule vie, au prix d'un effort réalisable par tout un chacun, pourvu qu'il soit de bonne volonté. Plutôt que rêver à des miracles ascétiques impossibles à produire (les causes n'étant pas là), pourquoi ne pas faire simplement ce qui est en notre pouvoir, aider notre prochain dans la mesure de nos moyens, et accepter les souffrances que Dieu ne manquera pas de nous envoyer afin de pouvoir réaliser ce que nous lui demandons ? Car il faut bien comprendre que Dieu n'est pas une abstraction, c'est un esprit incorporel omniscient dans sa sphère et omnipotent, qui a entre autres le pouvoir de nous transformer de l'intérieur. En envoyant son émanation (Jésus), il a établi une nouvelle loi qui dit qu'il mettra à contribution les esprits du ciel (ceux qui ont pouvoir de changer notre esprit en purifiant nos canaux gouttes et vents) à condition que nous aidions nos frères. Dit autrement, les riches du Ciel ont, sous la juridiction de ce Bouddha particulier, le devoir d'aider les pauvres de ce monde, si et seulement si ces derniers montrent de la bonne volonté entre eux. En effet, les esprits incorporels (tu peux les appeler des sambhogakayas) ont le pouvoir d'agir sur la matière par l'intermédiaire de "fluide" (les spirites en parlent mais ça ne concerne pas que les esprits inférieurs). Un grand nombre d'écrits montrent que de nombreux saints ont réalisé ce corps illusoire après lequel tu cours, sans aucune ascèse, et parfois très jeunes, simplement en se montrant charitable et en subissant sur la fin quelque terrible maladie qui les a fait énormément souffrir, ce qui est nécessaire pour purifier le corps subtil (on le comprend puisque cela déplace tous les vents).
C'est un pari qui a bien plus de chance d'être gagnant, de consacrer chaque instant disponible à aider les êtres pour être aidés par des êtres infiniment plus puissants que nous, plutôt que de croire qu'on va arriver par ses propres efforts misérables à l'état de bouddha où on ne se couche plus et on ne dort plus. Dans un cas, on est assisté par rien du tout si on n'a pas été inscrit dans une "liste" de toute éternité et choisi pour être un disciple et un successeur, ce qui ne vaut pas pour le commun des mortels, et on risque de mener une vie bien triste et ennuyeuse, sans rien partager avec les autres. Dans l'autre cas on dispose de l'assistance permanente de son Ange personnel et des Esprits (dont le Nom générique est le Saint Esprit) qui nous prennent en charge et nous portent spontanément vers notre but pour peu qu'on appelle leur action en posant des actes concrets attestant de notre foi et de notre confiance en Dieu. Et on demeure en compagnie des autres. Dans le Christianisme, le salut se fait dans et par le temps, à partir du moment où une décision de se donner à un Etre autre que soi a été établie et fermement posée, ce qui permet de trouver une famille à la fois naturelle et surnaturelle. Il n'y a pas besoin d'être quelque chose de spécial, mais d'accepter de servir d'autres que soi-même grâce à l'aide de Dieu. Le Bible est pleine de récits témoignant de l'activité incessante de ces esprits, qui se traduit par des signes bien spécifiques, qu'on ne retrouve pas dans les récits bouddhistes.
Cela donne deux modes de vie complètement différents. Je préfère l'inspiration de Jean de Cronstadt (http://parousie.over-blog.fr/article-la-priere-selon-saint-jean-de-cronstadt-112537099.html) dont je peux reconnaître la bienfaisance de l'action, que de Rinpoche lointains qui n'agissent que pour leurs pairs et se moquent des autres (qui n'existent pas dans leur système). Ces derniers temps il nous a été donné de nombreuses confirmations de cette triste réalité, et surtout de la quasi-impossibilité de réaliser le corps illusoire de nos jours (en tous cas en Occident).
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