Que sont les parents ?
La thérapie primale consiste à considérer les faits, et non les pensées. Mais les concepts ont la vie si dure qu'un esprit fort qui a grandi sans l'imagination de ses parents, comme moi, pourrait penser que cela ne s'applique pas à lui. Ce qui serait un total contresens. En effet, même si le concept ou la structure visible ou la référence n'existe pas dans l'intellect, l'existence physique des parents est indéniable, ainsi que les besoins du nourrisson, qui ne naît pas dans la conceptualisation. Que l'on ait pu construire une représentation du monde sans la présence symbolique des parents ne veut pas dire qu'ils sont absents de la réalité, ils le sont simplement sous une autre forme. Mais dire qu'on aurait pu se faire sans les parents, c'est comme dire qu'on aurait pu se faire en dehors des lois du yin et du yang sous prétexte qu'on n'aurait pas "yin" et "yang" écrits sur le front. ce serait la preuve qu'on vivrait dans un univers complètement irréel, ou conceptuel.
Donc, même si l'on ne trouve pas la trace symbolique de ses parents dans son vécu, il ne faut pas longtemps pour en trouver la trace réelle, dans de nombreuses sensations. Il suffit au fond de prendre n'importe quelle sensation un peu déplacée, comme les horloges sinistres déjà citées, pour découvrir la présence par défaut des parents. Un endroit dont l'atmosphère est jugée sinistre, est un endroit sans parents. Des gens dont nous voulons l'approbation ou l'admiration, dont des substituts des parents. A chaque fois que nous essayons de faire quelque chose de pénible, ou de prendre un air contraint, c'est pour les parents. Si nous mangeons trop, c'est pour combler le vide laissé par l'absence des parents. En réalité, les parents brillent beaucoup par leur absence, même chez ceux qui ont développé les structures correspondantes. Plus généralement, tout ce qui dans notre attitude n'est pas dicté par la sensation de la compassion qui est la sensation générée par notre état naturel, est dicté par les parents. C'est aussi simple que ça, car ce sont eux qui nous ont donné toutes les injonctions qui ont façonné notre ego (ou "moi irréel"). Si l'on fait des efforts pour être gentil, serviable, capable, intelligent etc... c'est toujours pour eux. Ce qui n'est pas pour eux, c'est ce qui nous vient par la compassion, donc sans effort. Donner des sous à un clochard : non parce qu'on pense que c'est bien, mais parce que ça nous fait mal de le voir comme il est. Ne pas donner de sous à un clochard : non parce que c'est un roumain qui bat ses gosses, en tous cas on nous l'a dit, mais parce qu'on sent chez lui le mensonge et qu'on ne peut pas l'approuver physiquement. Etre gentil avec son petit elfe : non pour qu'il soit gentil en retour, mais parce qu'on sent qu'il en a besoin, ou que ça le rend content. Nourrir son enfant : non parce que c'est l'heure, mais parce qu'il a faim. Donner un darshan : non parce qu'on va nous admirer comme un gourou, mais parce que c'est ce qui se passe naturellement (c'est rare). Tout le reste, la peur, la jalousie, la colère, l'inertie, l'attachement, tout cela peut être décodé très simplement en fonction de cette structure primordiale inscrite dans tous les organismes qui ne se reproduisent pas par sisciparité, le besoin d'un ou deux grands-êtres censés protéger et éduquer. Que ce soit dans la présence ou dans l'absence, un oeil averti peut les déceler à tous les niveaux.