La précieuse existence humaine
Quand on connaît la difficulté extrême de trouver le chemin pour se sortir du samsara (il ne suffit pas de se mettre à la traîne d'un soi-disant gourou, ou d'une soi-disant tradition qui détient seule le chemin du salut), il est effrayant de constater comme certains êtres sont capables de gâcher une chance unique qui ne se représentera peut-être plus avant des millions d'années. S'ils la gâchent, c 'est qu'eux-mêmes ne la voient évidemment pas, mais c'est ne réalité quelque chose qui est hors de toutes proportions avec tout le reste. Gagner à l'euromillions, devenir un génie, trouver la femme de sa vie et retrouver sa jeunesse, tout ça conjugué n'est rien en comparaison d'une telle chance. Tout simplement parce que cela ne met en jeu qu'une seule vie, sans y garantir en plus un bonheur véritable. C'est au mieux quelques décennies dans le monde des dieux, et retour en enfer.
Je crois que finalement très peu de gens arrivent à juger le samsara pour ce qu'il est. La majorité ne voit même pas qu'il n'y existe pas une seule seconde qui soit digne du moindre intérêt. Qu'il ne s'y passe absolument rien. Et que parti comme c'est, ça va durer des millions d'années. Mais comme je le disais à Petit Elfe, il n'y a que la comparaison avec le pain qui dévoile la véritable nature du plastique. Le seul souci c'est que si on donne du pain aux mangeurs de plastique, ils sont incapables d'en reconnaître la qualité, comme des aveugles qui ne font pas la différence entre un tableau de Michel-Ange et une toile peinte avec une queue d'âne.
Récemment je me rappelais mon état d'esprit quand j'allais travailler il y a 20 ans, c'est absolument monstrueux en fait, ça ressemblait à un magasin pour touristes plein de trucs en toc absolument sans le moindre intérêt. Et il est facile de voire que 99,9% (sinon plus) des gens sont comme ça. Sinon on trouverait un peu plus de conseils adéquats pour se débarrasser des pensées parasites, à la place des milliers de sites racontant n'importe quoin sur la spiritualité et la méditation. En fait il est très facile de se défaire de toutes ces pensées sans intérêt, si on en a qui ont de l'intérêt (et qui sont développées par le stade de génération). Il n'y a pas à se battre contre le mental quand on médite, de même que si on a un bon repas à manger, on ne va pas faire des efforts violents pour éviter de manger des crottes de chien. Donc si les gens se jettent sur les crottes de chien et s'en lamentent, il est facile d'en déduire qu'ils n'ont rien d'autre sous la main, et qu'ils vont se réincarner dans une situation tout aussi confuse, et que ça risque de durer une éternité.
Pour rester dans le samsara il est nécessaire d'être complètement endormi, sinon c'est un endroit trop affreux. Mais pour en sortir, il est nécessaire d'ouvrir les yeux. D'où un passage difficile. Pour changer, il faut savoir qu'on va mal, c'est de la pure logique. Si on pense qu'on va bien, on reste où on est. Si quelqu'un se trouve dans une maison confortable où il est heureux, qu'est-ce qui pourrait le pousser à vouloir en chercher une autre ? Le problème est donc à la base, dans le fait d'ouvrir les yeux. Les gens luttent de toutes leurs forces pour ne pas ouvrir les yeux, surtout qu'ensuite que feraient-ils ? Car il faut bien le dire, quasiment rien de ce qui est proposé ne fonctionne.
Bref, la chance inouie de pouvoir se sortir de là, c'est en réalité à cela que s'applique a définition de la précieuse existence humaine :
Kalou Rinpoche :
Il est possible en effet de répartir les humains en trois catégories :
- La première regroupe les hommes qui ne suivent aucune voie spirituelle et commettent sans cesse des actes négatifs. C'est une existence humaine funeste dans la mesure où elle conduira nécessairement à renaître dans des mondes où la souffrance est très grande.
- La deuxième concerne ceux qui ne pratiquent pas non plus de voie spirituelle, mais n'accomplissent rien de très négatif ni rien de très positif. Leur existence est moyenne car elle conduira à renaître dans une condition moyenne, ni très heureuse ni très douloureuse.
- La troisième catégorie s'applique à ceux qui connaissent le Dharma, ont rencontré des maîtres et suivent leurs enseignements. Dans ce cas, l'existence humaine est dite "précieuse"
Certaines matières comme l'or et le diamant sont regardés comme précieux parce qu'ils permettent, grâce à leur valeur marchande, d'acquérir tout ce que l'on veut. De la même manière, la vie humaine passée au service du bien et de la pratique spirituelle est précieuse non pas parce qu'elle engendre des possessions matérielles, mais parce qu'elle prépare des richesses beaucoup plus grandes : le bonheur et la libération.
A la valeur de cette existence s'ajoute sa rareté. On dit traditionnellement que les humains ordinaires sont aussi nombreux que les étoiles qui brillent la nuit dans le ciel, tandis que ceux qui possèdent la précieuse existence humaine ne sont pas plus fréquents que les étoiles du ciel diurne. Sans même nous référer à cette comparaison, il nous est facile de regarder autour de nous et de voir combien peu de gens sont engagés sur une voie spirituelle. Réfléchissons simplement à la ville où nous habitons et nous constaterons rapidement la rareté de ce type de personnes.
Pour reprendre ce que je disais plus haut, pour moi c'est un sujet d'étonnement perpétuel de constater que si l'on offre à un humain ordinaire la possibilité d'acquérir une précieuse existence humaine, ceci à l'aide de ses propres mérites dont on va lui donner une partie, certains refusent. Heureusement qu'il y en a qui acceptent, même s'il faut ensuite distinguer entre ceux qui ont la capacité d'en faire quelque chose et ceux qui ne l'ont pas.